Aliments complémentaires chez le chien et le chat : quand et comment les utiliser ?
Par Isabelle Bouissou, med. vet.
Les aliments complémentaires sont des denrées alimentaires servant à compléter l’alimentation, et constituent une source concentrée de nutriments ou de substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique¹. Parmi eux, on peut citer par exemple : les probiotiques, les acides gras essentiels, les vitamines, et les chondroprotecteurs. Mais comment les utiliser de manière pertinente ?
Aux Etats-Unis, environ 10 à 33% des chiens et des chats reçoivent au moins un type d’aliment complémentaire, en continu ou en cures, et leur utilisation est également de plus en plus répandue en Europe (environ 15% des foyers avec un animal). Les raisons qui motivent les propriétaires à administrer des compléments à leurs animaux sont multiples : pour améliorer la qualité du pelage, pour soutenir les articulations, « booster » le système immunitaire, en prévision d’un effort particulier, pour aider lors de certains troubles ou d’épisodes de stress, ou simplement pour compléter/personnaliser un régime alimentaire. L’aspect émotionnel entre également en jeu pour le propriétaire qui ainsi « prend soin » de son animal en lui donnant un supplément de nutriments.
De fait, il existe aujourd’hui une grande variété de compléments disponibles et il n’est pas évident de déterminer lesquels choisir, ainsi que quand et comment les utiliser.
Avant tout, il faut prendre en compte les besoins physiologiques du patient, la composition et l’efficacité du complément, la sécurité d’utilisation, et également la facilité d‘administration.
1. Le patient : a-t-il besoin d’un complément ?
- En principe, un animal sain, nourri avec une alimentation de qualité, complète et équilibrée n’en tirerait pas forcément de bénéfices additionnels².
- Cependant, chaque chien ou chat est unique, et le besoin en certains nutriments peut être augmenté dans de nombreux cas, par exemple en fonction de son activité (chien sportif ou de travail par exemple), lors de certaines affections ou situations entraînant un stress, voire même selon la qualité ou couleur du pelage³. Lorsque l’alimentation seule ne permet pas de couvrir ces besoins il sera alors essentiel de donner un aliment complémentaire adapté.
2. Comment choisir un aliment complémentaire efficace ?
- L’efficacité d’un aliment complémentaire dépendra de sa concentration en nutriments, de leur digestibilité/biodisponibilité, et de leur processus de fabrication et conservation.
- Devant la multitude d’aliments complémentaires disponibles sur le marché, l’on choisira de préférence ceux dont les bienfaits ont été prouvés cliniquement, ou dont les bienfaits de ses composants isolés l’ont été.
- Les principes actifs du complément doivent être présents en concentration suffisante : c’est-à-dire à des concentrations identiques ou supérieurs à celles déterminées par les études cliniques, et scientifiquement prouvées pour apporter des bénéfices à l’animal.
- Les périodes et durées d’administrations sont aussi à prendre en compte : certains compléments seront donnés à long terme (p.ex. les chondroprotecteurs) et d’autres en cures, lors de périodes particulières, de changement de saison (les probiotiques, beta-glucanes, vitamines…).
3. L’utilisation d’aliments complémentaires est-elle 100% sûre ?
- Bien que les aliments complémentaires ne soient pas catégorisés comme des médicaments, et soient souvent d’origine « naturelle », il serait faux de penser que leur utilisation ne puisse pas entraîner d’effets secondaires ou d’interactions avec d’autres substances.
- La plupart des nutriments ont une SUL – Safe Upper Limit - à ne pas dépasser. C’est le cas notamment des minéraux et des vitamines liposolubles. Les vitamines A et D, normalement présentes en quantités largement suffisantes dans les aliments industriels, ont rarement besoin d’une supplémentation, et un apport excessif pourrait être délétère pour l’animal. De même pour les Omégas-3, utilisés pour leurs propriétés anti-inflammatoires efficaces, mais qui peuvent provoquer des troubles digestifs à dose excessive.
- À l’inverse, d’autres aliments complémentaires sont considérés comme étant assez sûrs d’utilisation car même une dose très élevée sera peu susceptible d’entraîner des effets secondaires : c’est le cas entre par exemple des probiotiques et post-biotiques.
- Toutefois, quel que soit le complément utilisé et afin de limiter les risques d’interactions ou de surdosage, n’oubliez pas de demander aux propriétaires en détail ce que l’animal reçoit (médicaments, compléments, alimentation) !
4. L’aliment complémentaire est-il facile à administrer ?
- C’est un critère essentiel pour le propriétaire, afin de garantir une bonne compliance et d’assurer une utilisation régulière.
- Les formats tels que les poudres à ajouter à la nourriture, les comprimés appétents ou les huiles permettent de doser assez précisément les quantités et sont en général très bien acceptés par les animaux.
- L’appétence est évidemment primordiale. Un aliment complémentaire parfaitement formulé, dont l’efficacité des composants est prouvée, n’aura malheureusement aucun effet si l’animal refuse de le manger !
Une fois tous ces critères pris en compte, il vous sera alors plus facile de sélectionner l’aliment complémentaire le plus adapté à vos patients, afin qu’ils en tirent le meilleur et soient le plus en forme possible.
Références:
Directive 2002/46/CE du Parlement Européen et du Conseil du 10 juin 2002 relative au rapprochement des législations des États membres concernant les compléments alimentaires
https://acvn.org/frequently-asked-questions/D’après l’American College of Veterinary Nutrition² « Si l’animal mange une nourriture complète et équilibrée, les suppléments ne sont pas recommandés, à moins qu'ils ne soient spécifiquement prescrits par un vétérinaire. Cela réduit les risques d'excès et d'interactions négatives avec les nutriments ou les médicaments ».Consulté le 16 mai 2023.
Cats Require More Dietary Phenylalanine or Tyrosine for Melanin Deposition in Hair than for Maximal Growth Peter J. B. Anderson, Quinton R. Rogers, James G. Morris - The Journal of Nutrition, Volume 132, Issue 7, July 2002
Crissier, le 1er juin 2023