Oligoéléments en pratique, quelques réflexions pour une bonne utilisation !
Par Bruno Robert, med. vet.
Avec de nombreuses interactions et fonctions au sein de l’organisme, les oligoéléments d’intérêt nutritionnel sont indispensables au bon fonctionnement des différentes fonctions vitales. Leur utilisation peut dès lors sembler complexe, mais elle demeure néanmoins un sujet d’actualité en pratique.
Le Cu, Zn, Mn, Co, Sel, I, Fer sont essentiels en très faible quantité, mais leurs effets sur le métabolisme sont par contre très importants. Aujourd’hui, les besoins en oligoéléments, minéraux et vitamines ont augmenté en raison de l’amélioration de la productivité, de l’appauvrissement des sols (du fumier de vaches carencées n’enrichira pas les sols) et de l’utilisation de monocultures qui présentent des lacunes dans leur composition. Les fourrages ont des teneurs en minéraux très variables selon les sols leur variété botanique et d’autres facteurs extérieurs, et donc les rations sont parfois inadaptées.1,2,3
Leur rôle est essentiel dans l’activation enzymatique, l’élaboration de vitamines et d’hormones, dans la réponse immunitaire, et dans la gestion du stress oxydatif.2
Par exemple, le Cu intervient dans l’hématopoïèse (90 % du Cu est sous forme de céruléoplasmine, une ferroxidase), dans la synthèse du collagène, de l’élastine, de la myéline, kératine et mélanine. En cas de carence en Cu, les systèmes nerveux, cardiovasculaire, immunitaire et la peau seront touchés. Un autre exemple, le sélénium intervient essentiellement dans la réponse inflammatoire (prostacycline, thromboxane), dans l’immunité et limite l’oxydation (glutathion peroxydase). En cas de carence en Se, les fonctions de production, de reproduction et de défense seront diminuées.1,2,4
Les symptômes cliniques d’une carence en oligoéléments sont parfois multiples et peu visibles (importance de faire un dosage). Lors d’un manque d’ingestion ou d’un apport insuffisant, les organes de stockage vont être sollicités, et les réserves vont diminuer sans conséquence dans un premier temps. Si la carence persiste, le taux plasmatique diminue avec une baisse de performance et apparition de signes cliniques plus graves.
Les besoins en oligoéléments minéraux et vitamines varient selon l’âge, le type de production et d’élevage.
Pour les veaux, l’idéal est bien sûr d’apporter en quantité suffisante ces oligoéléments durant la gestation. Il est souvent difficile, voire illusoire de corriger une carence à la naissance (attention aux primipares qui doivent combiner gestation et fin de croissance). En reprenant l’exemple du Cu, les réserves à long terme du veau dépendent fortement du statut de la mère durant la gestation. Si la mère est carencée, le veau sera néanmoins privilégié avec un taux nettement supérieur à la mère. Avantage important car le lait est pauvre en Cu (et en oligoéléments en général). Lors de son développement, le veau sera soumis à divers stress (mise à l’herbe, changement température, maladies néonatales, BPE, etc.) durant lesquels un apport ciblé sera primordial. Une carence en Cu se traduira par une baisse d’appétit, des troubles cardiaques, du pica, des boiteries, dépigmentation des poils…1,4,5
Pour les primipares et les vaches (allaitantes et laitières), la mise à la reproduction, la gestation, la préparation au vêlage et la période post partum sont autant de situations où un apport adapté en oligoéléments est crucial. Prenons l’exemple du Se cette fois. Une carence donnera des troubles de la reproduction (rétention placentaire, involution utérine retardée) par un déficit en prostaglandine, une déficience du système immunitaire tant de la mère que du fœtus.5
Des interactions existent dans l’absorption des oligoéléments et minéraux (ex : Mo, S et Fer inhibent l’absorption du Cu).4 Plusieurs formes de minéraux et oligoéléments avec des différences de biodisponibilités (organiques, inorganiques) existent. Tout ce qui est ingéré ne sera donc pas nécessairement absorbé et utilisé.
Pour que le métabolisme soit le plus performant possible et que l’organisme puisse faire face aux différents stress et maladies, il est indispensable de complémenter les bovins avec un aliment minéral adapté à leurs besoins.
Références:
- Francois Meschy, Nutrition minérale des ruminants, éditions Qae, 2010, 208p
- Rollin Frédéric, Mise en évidence des carences en oligo-éléments dans les exploitations bovines. Congresso de Ciências Veterinárias [Proceedings of the Veterinary Sciences Congress, 2002], SPCV, Oeiras, 10-12 Out., pp. 95-106.
- Schlegel P., Wyss U., Teneur en oligo-éléments des fourrages, Renc. Rech. Ruminants, 2013, p. 20
- Neville F. Suttle, Mineral nutrition in livestock, 4th edition, 562p
- Guillaume LEQUEUX, Santé et performances chez les bovins : rôles des oligo-éléments. Nutrition et santé, journée des SNGTV 2016, Nantes.
Crissier, le 1er juin 2022